
A la suite de mon article sur les conseils d’écritures donnés par Anne Lamott au sujet des personnages d’un roman, j’aimerais vous mener à la rencontre de mes propres personnages… ou plutôt, à ma façon de les concevoir !
De quelle façon mes personnages sont-ils introduits ? Pour quelles raisons ? Je vous explique tout cela dans cet article, non en gage de vous donner de bons conseils (il n’y a pas de mauvaise manière pour mener son lecteur à la rencontre du personnage !), mais en vous exposant mon point de vue et mes habitudes d’écriture.
I – D’obscurs personnages
Une première chose à savoir sur mes habitudes d’écriture est que je n’aime jamais dévoiler entièrement mes personnages. En d’autres mots, j’aime permettre à mon lecteur de deviner la part d’ombre de mes personnages, de tisser par sa propre imagination les restes de ma création. Cela, je pense, vient du fait de mon incapacité à pleinement visualiser mes idées – tout comme j’ai une bien pauvre mémoire visuelle ! Je marque les traits grossiers de mes personnages, mais ne me fait jamais une entière idée sur leur ressemblance.
Certains lecteurs me reprocheraient ce manque de détails, habitués qu’ils sont à l’univers du cinéma qui impose une image propre. Je ne peux que les comprendre : nous sommes dès à présent une génération qui réagit plus vivement à tout ce qui touche au visuel. Pour autant, je ne pense pas cette habitude un si grand défaut : il permet à mon lecteur une certaine participation dans la création et personnalise la relation qu’il entretiendra avec les protagonistes.
II – Une double évolution
Nous l’avons vu dans mon dernier article : il ne peut y avoir d’intrigue sans évolution du personnage. Là où je suis forte, c’est que mon effort de création suit généralement une double évolution des personnages – quoique je sois la seule à pouvoir témoigner de la première.
La vérité est-elle : je ne crée jamais mes personnages avant de débuter un roman. Dans mes carnets, vous ne verrez pas la trace de fiche personnage avant une bonne avancée de la rédaction de mon roman : cette fiche n’est là ni pour détailler mon personnage, ni pour le préparer à l’aventure qu’il va entreprendre. Cette fiche n’est généralement qu’une liste d’informations que je complète au fur et à mesure de ma rencontre avec mes personnages, m’évitant ainsi toute confusion ou possible incohérence sur la suite.
Là est un point tout aussi important : je suis la première lectrice à partir à la rencontre de mes personnages. Bien que je sois leur créatrice, il me semble important d’instaurer avec eux une relation de confiance, leur laissant l’occasion de me surprendre et de décider de leurs propres actions, en toute connaissance de conséquences de celles-ci. En somme, une relation qui m’est inspirée de ma propre relation avec mon Créateur, Dieu.
J’apprends à connaître mes personnages par la plume et plusieurs jets me seront nécessaires pour pleinement les découvrir. Le premier me les fera découvrir sous des traits relativement grossiers et avec une histoire encore à entendre. Les futures réécritures se chargeront de les affirmer. Je ne déclare mon roman fini qu’une fois les personnages totalement révélés.
Après quoi, seulement, pourront-ils se révéler au tour du lecteur…
III – Une variété des opinions
Une chose qui peut être difficile à instaurer pour un auteur – voire impossible à réaliser totalement – est une variété des points de vue et des opinions dans son œuvre. Cela implique une bonne observation de notre entourage ainsi que d’une prise de recul nécessaire à nos propres opinions. Pourtant, c’est bien là quelque chose que je m’efforce de faire.
Un parfait exemple serait ma nouvelle « Billes de combat » où j’expose trois points de vue sur les événements des années 60 aux US : celui d’un vétéran, transformer par son expérience de la guerre ; celui d’une chrétienne qui entend le cri humain de Martin Luther King ; enfin, celui d’un jeune hippie, en quête d’une nouvelle expérience de sa vie et de son identité. Je ne peux pas nécessairement partager tous ces points de vue, mais je veux les faire entendre, tout en délivrant mon propre – encore une fois, non pas dans l’idée de l’imposer à mes lecteurs.
Du point de vue des origines, il m’est plus difficile de partager – comme je suis loin de pouvoir témoigner véridiquement des cultures loin de celle occidentale, qui prend malheureusement une place de grande influence dans le monde. Il me faudrait pour cela prendre le parti de voyages pour découvrir de nouvelles cultures, ce que je réaliserai volontiers lorsque l’occasion se présentera.
IV – Des personnages qui se complètent
Une autre marque de mon style est mon incapacité à épargner mes romans d’un des deux sexes : il n’y aura d’ailleurs que rarement un seul protagoniste, généralement au nombre de deux, et chacun représentant son sexe. Ce mix des points de vue me semble tout aussi important qu’essentiel : car, selon moi, l’un ne va pas sans compléter et approfondir l’autre. Là où le genre masculin peut manquer de qualités, le genre féminin viendra soutenir par sa présence – et vice-versa.
Dans Remous, c’est l’indéfinissable Kristen qui poussera Loïc à une démarche édifiante pour transformer sa vie. Dans L’Héritage d’un monde, c’est la rencontre d’Alianna qui projettera Naran dans une aventure qu’il était loin d’escompter. Enfin, on entend plutôt une intrigue amoureuse dans l’Oiseau en cage. Beaucoup d’autres de mes projets suivent cette caractéristique – à croire que je ne saurais m’en défaire tout à fait !
Pour autant, il arrive que ces personnages se retrouvent seuls, ou en tout cas loin de leur paire. Ce n’est alors que pour mieux étudier l’importance de leur relation et de leur besoin l’un de l’autre !
V – Des personnages stéréotypes
Enfin, malgré la présence d’une variété de points de vue, je ne pourrais pas nier la répétition de certains personnages dans mes œuvres. Entre autres, on notera souvent la même figure « sage » d’un personnage d’expérience et à la pensée rationnelle qui se caractérisera par son goût prononcé pour le thé. En un sens, on peut dire que ces personnages me ressemblent, car ils portent le plus probablement ma propre voix.
J’espère que cet aperçu sur mes personnages et ma façon de les concevoir vous aura plus. Quelle est votre relation avec vos personnages ? Comment les accouchez-vous de votre imagination ? Et vous, lecteurs, que préférez-vous dans un personnage ? Qu’est ce qui fait son succès ? Je vous souhaite à tous une très belle semaine et une bonne poursuite de tous vos projets.

Une réflexion sur “A la rencontre de mes personnages”