
Avec ce froid mordant, l’automne semble toucher à sa fin – on ouvre une nouvelle saison. La période de noël appelle traditionnellement au confort et au réconfort. Pourtant, dans nos sociétés de l’hyperactivité, cette période se charge plutôt de contraintes et de demandes. Pas le temps de souffler !
Heureusement, l’automne a été pour moi une occasion merveilleuse d’apprentissage en me confiant à sa douceur et à son calme. L’automne a su modeler mon cœur pour le rendre plus attentif aux besoins de mon corps – j’ai décidé d’un nouveau rythme : ralentir.
Organiser son temps ?
Ralentir ! Quel grand mot pour nos sociétés qui ne peuvent plus l’entendre. Non, il faut brusquer sa vie, ne pas en perdre une seule miette – sinon, tout est vain ! Le mieux, c’est quand on peut faire deux choses à la fois ; sinon, une bonne organisation permettra forcément un temps pour tout dans nos journées.
Ces réflexions, loin de l’aide dont je me faisais l’idée, conduisaient mon esprit à une forme de détresse : comment réussir ? Comment tout contrôler ? Mon esprit se tracassait à chercher la meilleure des solutions, le soir, en lieu de repos. Il fallait que telle chose soit faite le lendemain – cette heure, plus particulièrement, pouvait y être pleinement consacrée. Une plutôt bonne stratégie, me diriez-vous ! Où donc est l’échec ?
Je me rongeais les ongles à chaque instant, sous la contrainte de toutes les choses à accomplir. Mon cœur était perturbé ; mes pensées si loin de la tâche. Je n’étais plus disposée à ce qui était prévu à l’initial.
Et que dire de la pause ? Pas besoin ! Il n’y a que du temps à réserver pour le travail. Sauf que lorsque l’on bloque, du fait d’un trop plein, l’angoisse revient au galop et vous embrume davantage l’esprit. Tour crie au repos – mais vous êtes encore indécis. Si vous arrêtez maintenant, contrairement à vos premiers plans, vous vous sentez comme un coupable digne d’être mené à la prison. Ou pire : cela signifie que vous êtes faible.
Des vacances bien enrichissantes
J’ai appris à ralentir avec la venue de mes premières vacances, la première semaine de novembre. Je m’étais fixée un emploi du temps assez conséquent, avec une charge de travail qui me semblait nécessaire à la réussite tant de mes études que de l’avancement de mon projet d’écriture. Cependant, les circonstances en ont décidé autrement – et heureusement ! Je n’étais clairement pas joyeuse à la projection que je me faisais de mes vacances, et voilà qu’un puissant mal de tête abattait toute possibilité de travail… En mon dernier jour de cours, impossible de se concentrer ! Mon cerveau manifestait son mécontentement en me faisant la grève. Ma fatigue mentale était telle qu’elle contaminait ma santé physique – je me sentais si lasse… Il m’a fallut me résoudre à prendre du temps pour moi et oublier le reste.
Quelle bénédiction ! Je ne cherchais plus à me contraindre d’une quelque manière, mais saisissait l’instant comme il m’était donné – une envie de repos ? Il me fallait me l’offrir. Une envie d’écriture, après toutes ces semaines de luttes à n’en plus pouvoir ? Il me fallait me lancer. Cette semaine, j’ai bel et bien travaillé – mais pas de la manière que j’avais d’abord envisagé. Plus encore : longtemps n’avais-je plus été aussi plus efficace ! L’écriture, plutôt qu’une contrainte, s’est révélé un jardin de délice ainsi que d’un bon remède pour mon cerveau épuisé. Sans même me l’imposer, j’ai pu passer chaque jour près de deux heures à écrire. Cette réécriture de la première partie de mon roman sur laquelle je peinais tant, je la finissais en cette bienheureuse semaine…
Mais les vacances ne sont pas éternelles, mais il m’a fallut retourner à la triste ritournelle. Alors, je me suis demandée : pourquoi ne pas faire durer la chose ? Je me sentais si bien ! J’avais renoué avec moi-même, en écoutant les besoins de mon corps ainsi que mes disponibilités aux choses. N’avais-je donc pas le droit de me sentir aussi libérée de toute contrainte et de ralentir comme je le souhaitais ?
La chose n’avait rien d’évident : il me fallait oublier mes précédentes mauvaises habitudes. Ne plus craindre le temps qui passe. Rester fixée sur le temps présent. Vous le savez sûrement tout autant que moi : on ne change pas du jour au lendemain.
Ainsi, tel a été mon combat de ce dernier mois. Et, croyez-le, j’en sors renouvelée.
Toujours plus
Un autre problème de notre société occidentale se situe dans le besoin d’en vouloir toujours plus – toujours plus de temps, toujours plus d’argent, toujours plus de reconnaissance. Pour moi, cela s’exprime dans le « toujours plus écrire ».
Ah ! Comme c’est paradoxal… Moi qui défend si vertement la qualité avant la quantité, je me retrouve plongée dans le piège de vouloir toujours plus écrire et aller toujours plus vite. Il faut finir mon jet en trois mois – après, on passe à autre chose ! Je sais en être capable, là n’est pas le problème – mais mon œuvre en elle-même n’a-t-elle pas besoin plus de temps pour grandir ?
Vous l’aurez compris, j’ai pleinement échoué à terminer ma réécriture en un trimestre, contrairement à ce qui était planifié au départ. Et alors, « ce n’est pas grave », ai-je besoin de me dire. Là n’est pas l’important. Le temps ne se retournera pas contre moi, je peux le saisir selon ce dont j’ai besoin. Si mon projet nécessite de plus de temps, il faut le lui accorder sans gêne. Et pourtant… plus facile à dire qu’à faire !
Pour ne rien vous cacher, une trentaine de romans attendent de voir le jour dans mes vieux carnets refoulés dans le tiroir. Ces projets, j’ai a cœur de les tous porter, chacun dans son temps. Pourtant, la crainte de ce temps qui pourrait me manquer me saisit bien souvent : ne faut-il pas produire plus et plus vite pour accomplir ce rêve ?
Cela aussi me pèse, car me culpabilise lorsque le temps passe sans réelle production. L’inverse n’est pas sans différer : je culpabilise de négliger ainsi mon projet qui a besoin de maturation.
Alors que faire ? Encore, il me faut apprendre à lâcher prise : ne pas viser l’avenir, mais faire son mieux du temps présent. Si l’écriture ne s’offre pas aisément, c’est peut-être que j’ai à apprendre ou que cela exprimerait le besoin d’une autre nourriture. Il est alors temps de sortir, de s’ouvrir au monde et ses merveilles, d’observer et apprendre. Ces temps, contrairement à ce que l’on pourrait croire, sont aussi essentiels que l’écriture qui en dépend entièrement. Vous avez besoin de vivre. J’ai besoin de vivre.
Changement de perspectives
Aujourd’hui, je sais quelle direction je veux prendre : non pas en vouloir toujours plus, mais chercher à aller « toujours plus loin ». Ne pas dépasser le rythme et les limites des choses, mais les accomplir pleinement en ces jours qui me sont donnés.
On peut se rappeler la fable du « lièvre et de la tortue » : la vie est une longue course où il est bien inutile de se précipiter. Le tout, c’est de poursuivre avec persévérance. Il aura des temps pour s’arrêter, ralentir ; d’autres où, après avoir repris notre souffle, nous pouvons reprendre une meilleure foulée. Ces deux temps ne vont pas sans l’autre : tous deux participent à l’accomplissement de la tâche.
Un challenge qui encourage, est de tenter de se surpasser en douceur – de tirer de ses apprentissages quelque chose pour se perfectionner. C’est parfois en changeant nos méthodes, lorsque nous prenons conscience de la toxicité des précédentes, que l’on peut s’assurer de gagner en efficacité. De mon côté, mon changement de perspective sur mon organisation et ma considération du travail a apporté de grands fruits : entre autres, je suis parvenue à passer de 4h consacrées à l’écriture par semaine au mois de septembre à pas moins de 6h par semaine pour ce mois-ci. Cela vous paraîtra peut-être futile, mais quel soulagement pour moi ! Je ne parviendrai peut-être pas à produire davantage en attendant la fin de mes études, mais c’est un progrès qui m’encourage à poursuivre.
Courrez la bonne course et gardez en vue la récompense plutôt que le temps qu’il vous faut à fournir vos efforts et la crainte du futur. Prenez plaisir à ce que vous savez pouvoir saisir plus tard, quelque soit la distance qui vous en sépare. Le tout, c’est de reconnaître que nous sommes chaque jours un peu plus proches.
Je ne sais pas si je terminerai cette grosse réécriture de mon roman d’ici la fin de cette, mais j’ose l’espérer malgré tout – pour autant, je ne m’en fais plus une contrainte, plutôt un objectif. Quoi qu’il arrive, je prendrai mon temps – si ce livre nécessite encore de mes soins pour un moment, alors soit ! Profitons de ces journées comme d’un cadeau des plus précieux.
Comment considérez-vous votre temps de travail ? Comment l’organisez-vous ? Vos méthodes sont-elles efficaces ou vous pèsent-elles ? Cherchez – il n’y a pas de mauvaise réponse, ni de mauvaise méthode. Un méthode vous conviendra peut-être pour un temps, mais le jour viendra pour vous de la changer. Qu’est-ce qui est à changer dans votre vie dès maintenant ?
Je vous souhaite à tous un agréable dimanche et une bonne avancée sur vos projets.

2 réflexions sur “C’est l’Heure du Thé #14 – Mauvaise méthode ?”